À travers une série de 4 articles, AgriParis Seine vous propose de revenir sur la Politique agricole commune (PAC) européenne : une politique publique dont nous entendons beaucoup parler, mais dont il est parfois difficile de comprendre le fonctionnement et les effets concrets sur notre système agricole et notre alimentation.
Ce premier article retrace l’histoire de la PAC, de sa préfiguration au sortir de la Seconde guerre mondiale aux réformes qui ont progressivement dessiné la PAC que nous connaissons aujourd’hui.
Une politique au cœur du projet européen
L’idée d’une politique agricole commune émerge dès la signature du Traité de Rome en 1957 entre les 6 pays fondateurs de la Communauté économique européenne (CEE). Dans une Europe fragilisée par la Seconde guerre mondiale, la France, l’Allemagne, la Belgique, les Pays-Bas, le Luxembourg et l’Italie souhaitent sécuriser leur approvisionnement alimentaire et relancer l’économie en y développant la production.
Les 5 objectifs initiaux de la PAC sont les suivants :
- Accroître la productivité agricole
- Assurer un revenu équitable aux agricultrices et agriculteurs
- Stabiliser les marchés
- Garantir la sécurité des approvisionnements
- Assurer des prix abordables aux consommateurs et consommatrices
La PAC entre officiellement en vigueur en 1962. Véritable pilier de la construction européenne, elle est depuis le premier poste de dépense de cette alliance qui deviendra l’Union Européenne en 1993.
La première PAC : un mécanisme de soutien des prix sur le marché
La première PAC (1962-1992) est basée sur une logique de prix planchers garantis aux agriculteurs et agricultrices. Les États fixent un prix minimum en dessous duquel les produits ne peuvent pas être commercialisés. Ils interviennent donc directement sur les marchés. Tous les surplus agricoles sont ensuite rachetés par les États pour être stockés ou exportés, ce qui permet de sécuriser les revenus des agriculteurs et agricultrices. Pendant cette période, ils et elles augmentent considérablement leur productivité.
Ce système montre rapidement ses limites. Les surplus deviennent incontrôlables et leur rachat représente un coût de plus en plus important pour la CEE qui devait ensuite les stocker et subventionner leur export. En intervenant sur les marchés, l’Europe est aussi accusée de protectionnisme par d’autres États.
Les réformes de la PAC
La réforme McSharry de 1992
La réforme McSharry de 1992 transforme la PAC et son mécanisme de soutien des prix qui devient un mécanisme de soutien aux revenus. L’Union européenne installe alors un système d’assistance en allouant désormais une « aide » financière directe aux agriculteurs et agricultrices. En 2003, ces aides sont découplées, ce qui signifie qu’elles ne dépendent plus des quantités produites, mais de la surface des exploitations. Les « paiements à l’hectare » deviendront le premier pilier de la PAC et représentent encore aujourd’hui la majorité de son budget.
Le second pilier
Un second pilier visant à accompagner le développement rural est ajouté à la PAC au début des années 2000. Il englobe des soutiens ciblés sur l’innovation, l’environnement et l’installation des jeunes agriculteurs et agricultrices.
La place croissante de l'innovation, la compétitivité et l'environnement
L’innovation, la compétitivité et l’environnement occupent une place croissante dans les orientations de la PAC à partir des années 2000 : différents dispositifs sont introduits pour les encourager (bonnes conditions agricoles et environnementales, programme LEADER, etc.)
Les États membres et le parlement Européen
Les États membres et le Parlement européen gagnent progressivement en influence quant aux orientations de la PAC. Depuis le Traité de Lisbonne de 2009, on observe une renationalisation de la PAC. Chaque pays bénéficie maintenant d’une certaine flexibilité dans l’application de la PAC sur son territoire. D’autre part, le texte passe désormais par la procédure législative ordinaire, ce qui signifie que la PAC ne peut être votée sans l’approbation des eurodéputé·es.